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La multiplication végétative : se reproduire sans passer par la voie sexuée


Yann Duroc
Publié
July 9, 2020

La multiplication végétative, c'est la capacité qu'ont certains végétaux de constituer un nouvel individu sans passer par la voie sexuée.

Le processus de multiplication végétative

Les cellules végétales ont la caractéristique de pouvoir, dans certaines conditions, se dédifférencier et « revenir » à un état primordial : on appelle ça la totipotence ! Ainsi, une cellule de tige peut donner une cellule de racine. Ce phénomène est en jeu quand vous faîtes du bouturage.

Au niveau cellulaire, le mécanisme de régénération commence par la dédifférenciation, qui permet aux cellules de retrouver une organisation et un fonctionnement de cellules méristématiques (cellules souches pour faire simple). Les structures cellulaires évoluées régressent :

  • les chloroplastes (siège de la photosynthèse) retournent à l'état juvénile de proplastes,
  • les vacuoles (compartiment représentant 80 à 90 % du volume cellulaire et permettant, entre autre, aux cellules végétales de moduler leur turgescence) diminuent de volumes, se fragmentent pour ne représenter qu'une place réduite dans la cellule.

Simultanément à cette évolution cellulaire de dédifférenciation, les cellules retrouvent le pouvoir de se multiplier activement. Ceci permet l'apparition d'une masse de cellules méristématiques qui s'organisent pour former un nouvel organe (tige, racine, etc...). J’en avais parlé dans ce thread Twitter en introduisant la micropropagation et les processus hormonaux en jeu.

Ne faisant intervenir aucun processus lié à la reproduction sexuée, la multiplication végétative est caractérisée par l'absence de brassage génétique. Il en résulte que toute plante née de ce processus constitue un clone de la plante mère.

L'intérêt de la multiplication végétative

Ce mode de reproduction ne doit pas être seulement vu comme un processus accidentel mais comme un processus très efficace (qui se rajoute aux processus de reproduction sexuée) et, pour certaines plantes, le seul possible !

Une des conséquences de la multiplication végétative, c'est la capacité de ces plantes à occuper des territoires vastes en un temps très court puisque indépendant du temps de génération de la plante mère !

De plus, grâce à des méthodes exploitant la multiplication végétative, l'homme a pu conserver des espèces et des variétés dont il voulait maintenir les qualités intrinsèques.

Exemples de multiplication végétative

La multiplication végétative peut être réalisée à partir d’organes végétatifs ordinaires (par la régénération dont je viens de vous parler), mais aussi, pour certaines espèces, à partir d'organes spécialisés. Je vais vous donner des exemples de chaque cas.

À partir d'organes végétatifs ordinaires

1. Le marcottage

De nouveaux individus sont formés à partir de portions d'une plante mère, qui au moment de leur séparation, possède tous les organes nécessaires à une vie autonome (racine, feuille).

On retrouve cette capacité chez nombre de plantes aquatiques (Elodée...) mais aussi chez des végétaux à tiges rampantes (Lierre...).

Un cas particulier de marcottage est celui qui peut se faire à partir de feuilles. Les jeunes plantules se forment au niveau de territoires foliaires où les cellules sont restées à l'état embryonnaire.

C'est le cas chez la Cardamine des prés (Cardamine pratensis). Sur les feuilles les plus proches du sol se forment plusieurs plantules qui seront indépendantes de la plante mère une fois la feuille d'origine disparue.

2. Le bouturage naturel

Dans ce cas, un rameau se détache de la plante et s'enracine (les racines succèdent au détachement contrairement au marcottage).

On retrouve ce mode de multiplication chez les "cactus raquettes" du genre Opuntia, chez de nombreuses plantes grasses du genre Sedum, ou chez les Echeverias (photo ci-dessous, merci à Hedgedoc) où les ressources de la feuille sont remobilisées pour la mise en place d'une nouvelle plantule :

À partir d’organes végétatifs spécialisés

Chez de nombreuses plantes vasculaires, les organes qui assurent la multiplication végétative ont une morphologie et un mode de développement différent des organes végétatifs ordinaires.

1. Les stolons

Ce sont des rameaux à croissance horizontale caractérisés par (i) un fort allongement des entre-noeuds et (ii) une réduction de la surface des feuilles. L'enracinement se fait généralement au niveau du bourgeon terminal.

Un des exemples les plus connus est celui du fraisier (stolon aérien). Sur cette photo, on voit bien bien l'allongement des entre-noeuds (flèche bleue) :

Et sur celle-ci, la réduction de la surface foliaire (flèche rouge) :

2. Les rhizomes

C'est une tige souterraine (qui se démarque d'une racine de par ses feuilles atrophiées) qui peut être renflée (elle peut servir d'organe de réserve). Contrairement au stolon, il est résistant, ses entrenoeuds sont courts et à chaque nœud peuvent apparaitre des racines et des nouvelles tiges. Par exemple, le bambou :

Tous ceux qui ont des bambous dans leur jardin savent que c'est un système performant de propagation :

3. Les racines drageonnantes

Ce sont des racines à croissance horizontale sur lesquelles apparaissent des bourgeons qui donnent des tiges dressées ou drageons. On les retrouve chez les framboisiers.

4. Les bulbilles

Ce sont des bourgeons spécialement adaptés à la multiplication végétative, ils peuvent être axillaires ou néoformés.

4.a. Les bulbilles axillaires

Chez les plantes à bulbe, il peut se former dans le bulbe plusieurs bourgeons qui constitueront des bulbilles qui, à terme, se détacheront du bulbe principal pour former des pieds indépendants. Exemple chez la tulipe :

Mais "bulbilles axillaires" peut aussi décrire des bourgeons aériens renflés et formés sur des tiges. Ils restent en vie ralentie tant qu'ils demeurent en place. La dissémination des bulbilles axillaires aériens est plus efficace que les bulbilles axillaires souterrains. On peut les retrouver chez Lilium bulbiferum et ils ont une structure identique aux bulbes souterrains (plateau, écailles charnus) :

4.b. Les bulbilles néoformés

L'utilisation du terme "bulbille" pour décrire ce genre de structures est très problématique parce que ce sont des formations qui sont complètements différentes des bulbilles axillaires.

Il s'agit de plantules qui apparaissent généralement sur des feuilles n'ayant pas de contact avec le sol, ce qui les différencient des plantules issues de marcotte. Mes préférées sont celles de la Kalanchoé Bryophyllum daigremontianum :

Les plantules se développent directement sur la plante mère, sans phase de vie ralentie et sans accumuler de réserves... Quand les conditions sont réunies, elles se détachent et poursuivent leur développement au sol :

Je n'ai pas parlé des racines tubérisées ou encore de l'apoflorie (production de bulbilles à la place des fleurs), etc, etc. Tout ça pour vous dire que cette capacité des végétaux est tout bonnement fascinante. Merci de m'avoir lu jusqu'ici !



Ceci est l'archive de mon thread Twitter, faite par l'archiveur de threads de Share.


Yann Duroc

Docteur en génétique végétale & Ingénieur Agronome - Science & biotechnology lover ! Contre tous les obscurantismes