Quand est né le terme Intelligence artificielle ?



Cet article s'intéresse aux circonstances scientifiques et temporelles durant lesquelles est né le terme "Intelligence artificielle".

L'année 1956: contextualisation

Nous sommes en 1956, le président Dwight D. Eisenhower, 34 ème président des États-Unis, est candidat à sa propre réélection qu'il remportera en Novembre.

C'est également l'année de disparition d'Art Tatum, ce pianiste de jazz qui inspira notamment Rachmaninov et Horowitz.

Le Dartmouth College

C'est plus précisément à Hanover, dans l'État du New Hampshire, en Nouvelle-Angleterre, qu'il faut se rendre pour saisir la genèse de l'expression d'Intelligence artificielle. Une université privée, le Dartmouth College, y a été fondé en 1769. C'est ainsi une des plus anciennes universités des USA. Elle accueille aujourd'hui plus de 5000 étudiants.

Le colloque de l'année 1956

Un colloque d'une vingtaine de chercheurs, mathématiciens et informaticiens, y est organisé durant l'été. Il s'agit d'un brainstorming avec pour objectif clair d'adresser la question :

Comment réaliser une machine qui pense ?

Parmi les chercheurs présents à cette conférence, on compte notamment Marvin Minsky, John Mc Carthy, Alan Newell et Claude Shannon, autant de pionniers de l'Intelligence artificielle.

John Mc Carthy et la naissance du terme

John Mc Carthy introduit alors le terme d'Intelligence artificielle pour des raisons de neutralité. Il y a en effet alors plusieurs courants visant à créer une machine intelligente, tels que la cybernétique, la logique mathématique, l'approche sémantique, la théorie des automates ou encore celle des neurones formels.

Ainsi, l'intelligence artificielle, en tant que domaine d'étude, est antérieure à l'année 1956 ; c'est seulement son appellation, "Artificial intelligence", qui date, elle, de 1956. Le terme sert à regrouper en un même sein les diverses approches proposées pour aborder la question de la machine qui pense.

Le début du grand programme de l'Intelligence artificielle

Le colloque de Dartmouth n'est pas simplement important pour l'aspect étymologique de l'intelligence artificielle. Il marque également le début d'un vaste programme ayant pour but de créer une telle intelligence. C'est ainsi, au delà de simples termes, un sens, un but et une ambition qui naissent de ce regroupement de chercheurs.

Si le concept existait au moins du temps de la mythologie grecque, l'inauguration de l'expression "Intelligence artificielle" permet d'oser penser que le mythe peut devenir une réalité. Certains chercheurs s'enthousiasment au point de penser qu'il suffira de quelques années pour réaliser l'objectif de la machine pensante.

Symboliquement, l'engouement autour de l'IA débute donc en 1956, et des millions de dollars sont investis. Notons sans rentrer dans le détail que l'IA traversera d'autres périodes chaudes comme celle-ci, mais également des périodes froides. Quoiqu'il en soit, 1956 procure à l'intelligence artificielle son statut à part entière de nouvelle science et discipline académique.

Le terme existait avant 1956 !

Le terme "Intelligence Artificielle" existait en fait avant 1956. Il est apparu pour la première fois dans un article de 1955 annonçant la conférence de Dartmouth.

Les pères fondateurs de l'IA

La liste des participants effectifs du colloque de Dartmouth est un sujet à controverse, Mc Carthy ayant perdu sa propre liste. Cependant, Ray Solomonoff archiva une liste de vingt participants, dont certains sont présents sur cette photographie :

Il s'agit là de personnalités variés, tant par leurs spécialités que par leurs visions de l'IA.

Marvin Minsky est un des pères fondateurs de l'IA, ainsi que John Mc Carthy, créateur du langage Lisp, très utilisé dans les premiers programmes informatiques de l'IA. Alan Newell, prix Turing en 1975, a par exemple contribué au développement du langage IPL. Nous y voyons également Claude Shannon, célèbre pour ses avancées en théorie de l'information. Ray Solomonoff était quant à lui mathématicien, travaillant dans le domaines des probabilités algorithmiques et en théorie de l'apprentissage. Hebert Simon, célèbre économiste ayant reçu le prix Nobel, s'intéressait à la psychologie cognitive. Nathaniel Rochester a créé le langage Assembleur, aujourd'hui à la base de nos ordinateurs, et a inventé l'IBM 701.

Parmi les pères fondateurs de l'IA présents au colloque de Dartmouth mais absents de la photographie, on compte par exemple Julian Bigelow, qui était spécialisé en cybernétique et a contribué à la genèse de l'ordinateur. Ou encore Warren McCulloch est un neurologue qui a beaucoup contribué au développement des neurones formels. On peut également citer le mathématicien Abraham Robinson, inventeur de l'analyse non standard. Et enfin, le célèbre John Nash, auteur de la théorie des Jeux, à la fois prix Nobel d'économie et prix Abel en mathématiques.

Quelques recommandations bibliographiques

Pour celles et ceux qui voudraient aller plus loin, voici quelques livres récents sur le sujet :

• Intelligence Artificielle, Manuel de survie (Jean-Claude Heudin, 2017).
• Je cherche à comprendre... les codes cachés de la nature (Joël de Rosnay, 2016).
• La guerre des intelligences. Intelligence Artificielle versus Intelligence Humaine (Dr. Laurent Alexandre, 2017).
• Artificial Intelligence, what everyone needs to know (Jerry Kaplan, 2016).



Texte écrit par Lucas Willems